Turquie : Erdogan se retourne contre les Frères musulmans égyptiens
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, opère un virage à 180° à l’égard des Frères musulmans égyptiens. Après leur avoir offert un refuge sûr dans son pays, il leur demande désormais de «baisser le ton» à l’endroit du Caire, dans une tentative de rapprochement avec Abdel Fatah al-Sissi.
Des médias des Frères musulmans égyptiens basés à Istanbul ont été priés par les autorités turques de « baisser le ton » à l’égard du pouvoir égyptien, au moment où Ankara tente d’apaiser ses relations avec Le Caire après des années de crise. Istanbul est devenue ces dernières années « la capitale » de médias «ikhwanistes», notamment ceux des pays ayant connu les révoltes du printemps arabe comme l’Égypte, la Syrie, le Yémen ou encore la Libye. La métropole turque abrite notamment les bureaux de télévisions égyptiennes : Watan, l’organe des Frères musulmans, et Mekameleen, une chaîne indépendante proche de la mouvance islamiste.
Selon des sources au sein de l’opposition «ikhwaniste» égyptienne basée à Istanbul, les représentants turcs ont évoqué aussi auprès de certains médias « la suppression de certains programmes et l’exclusion de certains présentateurs. » « Cette suggestion a été rejetée, a affirmé l’une des sources à l’AFP, parlant sous couvert d’anonymat. Toutes les options sont ouvertes, y compris quitter Istanbul et s’installer dans un autre pays si on nous impose des règles qu’on ne peut accepter. »
Rapprochement Ankara-Le Caire
Ankara mène depuis plusieurs semaines une offensive de charme pour réparer ses relations avec Le Caire qui se sont fortement dégradées après la destitution en 2013 du premier président démocratiquement élu en Égypte, Mohammad Morsi, issu des Frères musulmans et soutenu par la Turquie. Les deux puissances régionales se sont en outre opposées ces dernières années sur de nombreux dossiers, en particulier sur la Libye où elles ont soutenu chacune un camp opposé.
Le 12 mars, la Turquie avait annoncé avoir établi ses premiers « contacts diplomatiques » avec Le Caire depuis 2013 pour mettre fin à près d’une décennie de crise. Le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukri a reconnu dimanche ces contacts diplomatiques, tout en affirmant que les mots d’apaisement d’Ankara « ne suffisent pas » pour rétablir entièrement les liens entre les deux pays, appelant Ankara à joindre les actes à la parole.
Dans des déclarations qu’il a partagées hier sur les réseaux sociaux, un conseiller de M. Erdogan, Yasin Aktay, a lui aussi démenti qu’Ankara envisageait d’expulser ou de livrer au Caire des journalistes ou des opposants égyptiens. « La Turquie n’arrêtera personne et ne livrera personne », a-t-il dit.
A.A./Agences