Nacer Djabi: “Le Hirak finira par gagner”
Le spécialiste en sociologie politique, Nacer Djabi, analyse la situation politique algérienne après le retour du Hirak. En observateur très proche du terrain, l’universitaire estime, dans une interview accordée dimanche au quotidien El Watan, que «la relance des marches du mouvement populaire reflète la détermination des Algériens à défendre leurs revendications.»
« Ils (les Algériens, ndlr) sont convaincus que ses revendications ne sont toujours pas satisfaites », a-t-il affirmé. Cette nouvelle « vague » du Hirak, a-t-il ajouté, « signe le début d’une nouvelle étape qui appelle à un changement de paradigme en vue de cueillir le fruit de cette révolution populaire pour le bien du pays et des Algériens. »
« Car le Hirak reste un moment historique qu’il faut exploiter positivement pour fonder un Etat national fort », a-t-il insisté. Mais, selon lui, le régime ne va pas dans cette direction. Selon le sociologue, les « tenants du pouvoir jouent sur les points faibles de la société algérienne, au lieu de valoriser ses points forts ». Ils reproduisent ainsi, a-t-il indiqué, les cartes jouées depuis les premières semaines du Hirak.
« Le régime a exploité le fait que les Algériens ne se connaissent pas suffisamment ainsi que les divisions des élites intellectuelles et politiques. Il a aussi attisé certains signes de régionalisme qui sont toujours présents dans un pays aussi vaste que l’Algérie », a-t-il soutenu. Et d’ajouter : « Cette attitude démontre que ce système devient un danger pour l’Algérie, pour les Algériens et pour l’Etat national lui-même, qui a été reconquis par les Algériens en 1962. »
Affirmant que l’enjeu social et la situation économique pourraient être plus présents dans le Hirak à l’avenir, Nacer Djabi a souligné que le Hirak, « qui compte sur ce qu’il y a de meilleur en Algérie, en mobilisant toutes les catégories sociales, a mis le régime dans une profonde crise d’où il n’en sortira pas. »
« Ce Hirak est un point de rupture avec le processus historique qu’il faut exploiter pour faire un saut qualitatif en comptant sur les compétences existantes au sein de la société que le régime a rejetées des années durant. Ce même système a mis en place des institutions fermées qui ont conduit finalement à son étouffement. Elles risquent désormais d’étouffer tout le pays », a-t-il tranché.
Pour conclure, Nacer Djabi a indiqué que le « régime peut freiner la solution réclamée par les Algériens (…) mais le Hirak finira par gagner, car il fonctionne selon la logique de l’histoire. ».
Boualem Rabah