Assassinat d’Ali Boumendjel: la famille du chahid dénonce “un mensonge de l’Etat français”
L’affaire de l’assassinat, maquillé en suicide, du militant nationaliste et avocat Ali Boumendjel revient au devant de la scène à la faveur du rapport de l’historien Benjamin Stora sur la “réconciliation des mémoires”.
Parmi les 22 propositions contenues dans le rapport remis par Benjamin Stora au président français, Emmanuel Macron, il y a celle portant sur la « reconnaissance par la France de l’assassinat, maquillé en suicide, de l’avocat et dirigeant nationaliste Ali Boumendjel pendant la Bataille d’Alger en 1957 ».
Aujourd’hui, la famille de l’avocat dénonce « un mensonge d’Etat » qui a empêché sa veuve, ses parents, sa fratrie et un de ses fils de connaître la vérité sur cette affaire avant de mourir. Plus de 60 ans après, sa nièce, Fadila Boumendjel-Chitour, professeur de médecine et militante des droits humains, raconte à l’AFP les souvenirs qu’elle garde encore de son Oncle, dont la mort, a-t-elle déclaré, “a façonné son adolescence.”
Septuagénaire, la dame dénonce un “mensonge de l’Etat (français) qui fut dévastateur.” “Lorsque nous avons appris le 9 février 1957 son arrestation, mon père était alors avocat à Paris. Je me souviens à quel point cette simple annonce a constitué un électrochoc pour lui”, a-t-elle raconté.
Et d’ajouter : “Il avait réalisé qu’étant donné l’horrible répression de l’époque, tous les dangers planaient sur la tête de son jeune frère. Il n’a cessé d’alerter les autorités civiles et religieuses de France, en envoyant des télégrammes pour dénoncer son arrestation arbitraire et l’absence d’information.”
Selon elle, à la fin du mois de février de la même année, “la famille a su qu’il avait été hospitalisé à l’hôpital militaire Maillot à Bab El Oued.” « Mon père a appris qu’il aurait tenté de se suicider avec le verre de ses lunettes. C’était glaçant. Je me souviendrai toujours du dimanche 23 mars, où j’entendis la voix de mon grand-père. Une voix blanche, une voix métamorphosée. Lui qui était très affectueux, me dit simplement: ‘’S’il te plaît, passe-moi ton père’’. Je me souviens de la réaction terrible de mon père qui était l’aîné et se sentait responsable”, a-t-elle témoigné, précisant que deux médecins de la famille furent appelés pour reconnaître le corps. “Les grands-parents eurent un chagrin énorme de ne pouvoir lui dire adieu. Son cercueil était scellé”, a-t-elle rappelé.
Boualem Rabah